"L'ordinaire, disait tante Lydia, c'est ce à quoi vous êtes habituées. Ceci peut ne pas vous paraître ordinaire maintenant, mais cela le deviendra après un temps. Cela deviendra ordinaire."
L'ordinaire de Defred, narratrice de ce récit, est inconcevable. Si on avait dû le lui décrire quelques années plus tôt, elle-même n'y aurait pas cru. C'est une servante écarlate de la république de Gilead.
À Gilead, tout est bien ordonné. Tout le monde a un rôle défini. Quand on a de la chance, on peut exister en tant qu'individu ; lorsqu'on en a moins, on nous attribue un prénom relatif à notre fonction. Chaque maisonnée est alimentée par rationnement. Chaque personne répond à un code vestimentaire correspondant à sa fonction. Les livres sont interdits à la population, comme la plupart des divertissements. Les conversations, les échanges, jusqu'aux simples regards croisés, sont autant de risques que l'on ne prend plus. La délation et les exécutions sont quotidiennes.
Defred porte le prénom de l'homme à qui on l'a attribuée – temporairement – afin d'assurer la reproduction de la famille. Elle ne sera jamais mère : les Épouses sont là pour ça. Elle n'est pas non plus prostituée : il lui est formellement interdit d'être séduisante, ni pour le Commandant, ni pour personne d'autre. Et pourtant... Elle se souvient de quelques années auparavant : elle avait une famille, un travail...
Ce classique de la littérature dystopique, publié pour la première fois en 1985, est un chef-d’œuvre : aussi dramatique que révoltant, il invente une société glaçante qui, tout comme celles d'Orwell, Huxley et bien d'autres encore, ne semble pas si étrangère à la nôtre. Margaret Atwood met une plume remarquable au service de la dénonciation des dangers que nous encourront encore aujourd'hui. La place des femmes y est centrale, mais pas excluante : Atwood questionne nos libertés fondamentales, les sentiments humains et notre besoin perpétuel de proximité.
À partir de ce livre, Bruce Miller a réalisé une série télévisée, « The Handmaid's tale », sortie en 2017. Je n'ai pas encore pu me résoudre à la regarder, de peur d'être déçue après cette lecture édifiante. Toutefois, qui peut juger avant d'avoir goûté ?
"Nolite te salopardes exterminorum !"
La Servante écarlate / Margaret Atwood
Lauriane
Lauriane vous dit tout sur "La servante écarlate", en vidéo...